Textile – habillement

Entre l'utilisation de substances chimiques et/ou nocives pour la production et la fabrication des fibres, le gaspillage des ressources provoqué par la surconsommation de vêtements, et la pollution générée par les kilomètres parcourus par un vêtement avant d'arriver en boutique, la mode est clairement l'une des industries les plus polluantes au monde. La diminution significative de l'empreinte viendra à la fois d'un changement profond de nos comportements d'achat et d'une révolution des producteurs qui devront délaisser les mécanismes de la fast fashion et repenser des produits textiles durables, réparables et recyclables.

Impacts écologiques et sociaux

Entre l’utilisation de substances chimiques et/ou nocives pour la production et la fabrication des fibres, le gaspillage des ressources provoqué par la surconsommation de vêtements, et la pollution générée par les kilomètres parcourus par un vêtement avant d’arriver en boutique, la mode est clairement l’une des industries les plus polluantes au monde.

L’industrie textile pollue notre environnement. Elle plus que tous les transports maritimes et aériens cumulés. Aujourd’hui, l’industrie de la mode génère plus d’1,2 milliard de tonnes équivalent CO2, soit 2,2% des émissions globales de gaz à effet de serre (GES), plus que les transports maritimes et aériens réunis. En 2050, le secteur textile émettrait même 26% des émissions globales de GES si les tendances actuelles de consommation se poursuivent. L’Agence européenne de l’environnement classe en 2019 la filière textile d’habillement et chaussures comme la 5ème pour les émissions de gaz à effet de serre, après le logement, l’impact direct des ménages, le transport et l’alimentation.

On estime actuellement que 4% de l’eau potable disponible dans le monde est utilisée pour produire nos vêtements. Le textile est le 3ème secteur consommateur d’eau dans le monde, après la culture de blé et de riz.

En France, ce secteur représente 2,7% du PIB, 150 milliards d’euros de chiffre d’affaires direct et un million d’emplois au total.

Outre son impact majeur sur l’environnement, l’industrie du textile – qui emploie directement au moins 60 millions de personnes – profite de la misère sociale. Plus de 40 millions de personnes y sont employés comme des esclaves modernes, dont 70% de femmes selon le Global Slavery Index (l’Indice mondial de l’esclavage). Cet esclavagisme moderne se traduit par des heures supplémentaires obligatoires non payées, l’emploi d’enfants, des humiliations, des violences, des privations (alimentation, passeport, logement) et des sévices sur des femmes qui ne remplissent pas leurs objectifs… Aujourd’hui, la confection de vêtements et les deuxième secteur où l’esclavagisme moderne est le plus important, après la fabrication d’ordinateurs et de smartphones. Un grand nombre de ces esclaves habitent dans les pays du Sud, travaillant dans les usines qui approvisionnent les marques occidentales de vêtements, sans que cela n’émeuve grand monde…

La raison centrale de ces impacts croissants du secteur tient à la quantité considérable et au renouvellement effréné de nos achats de vêtements. Chaque année, c’est près de 150 milliards de vêtements et accessoires qui sont vendus à travers le monde : une consommation qui a doublé en seulement 15 ans et qui illustre le nouveau phénomène de la « mode jetable » ou « fast fashion ». Cette surconsommation est bien entendu entretenue à dessein par l’industrie à coup de nouvelles collections saisonnières, prix de plus en plus bas, soldes et promotions, qualité moindre, événements nationaux et internationaux du type Black Friday, etc.

Or plus de 50% de notre garde-robe ne serait tout bonnement pas portée. Nous achetons par envie, pour suivre la mode, sans même faire le point sur ce que nous avons déjà, nous nous déculpabilisons en jetant ou en donnant notre ancien surplus pour faire de la place aux nouveaux achats. Finalement, plusieurs millions de tonnes de vêtements et autres textiles sont jetés dans nos décharges.

Chaque étape de la vie d’un textile est source de nuisances environnementales lourdes. Regardons cela de plus près.

Pour calculer l’impact environnemental réel des textiles, on prend en compte la production ou extraction de matières premières, la transformation et fabrication du produit textile, son acheminement, sa distribution, son entretien et sa fin de vie (réemploi, recyclage, destruction).

1. La production ou l’extraction des matières premières, synthétiques ou naturelles, est une étape parfois très polluante. On peut citer par exemple la quantité d’eau utilisée, les pesticides, le transport…
Ainsi, un impact considérable concerne la consommation d’eau avec l’irrigation, notamment pour le coton, et la phase d’ennoblissement. Cette dernière concerne la finition du textile, dont la teinture et le lavage. Dans la phase d’ennoblissement, on utilise aussi beaucoup de produits chimiques qui polluent les eaux et se retrouvent aussi en partie dans les vêtements.

2. Vient ensuite la phase de transformation et de fabrication. On peut citer l’impact du blanchissement et l’utilisation des colorants et autres produits néfastes pour la santé et l’environnement… La teinture des textiles est ainsi le deuxième pollueur d’eau dans le monde, selon le rapport de la Fondation Ellen MacArthur. Ajoutons à ces impacts le gaspillage lors de la découpe. Environ 15% du tissu part alors à la poubelle, ce qui constitue un énorme gaspillage de ressources.

3. L’acheminement, depuis l’autre bout du monde le plus souvent, est particulièrement polluant. On peut parler des containers en bateau, des avions, des camions… Environ 70% des textiles achetés en Europe viennent de l’Asie du sud-est, en avion ou en bateau.

4. Ne pas oublier la distribution, avec l’ajout d’emballages, la vente et parfois à nouveau l’acheminement… La plupart des vêtements sont emballés dans du plastique (polybag). 15% des emballages jetables dans le monde seraient, au passage utilisés par l’industrie textile.

A l’issue de toutes ces étapes en amont de l’acheteur final, quelques chiffres et exemples donnent le tournis :

Selon le rapport « Textiles and the environment in a circular economy » de l’Agence Européenne de l’Environnement, la production et l’utilisation de vêtements, chaussures et linge de maison dans l’Union Européenne en 2017 nécessitait 1,3 tonnes de matières premières et 104 mètres cube d’eau par personne !

Environ 85% des matières premières et 92% de l’eau proviennent de régions hors Europe. C’est la deuxième source de pression sur l’utilisation des terres (après la nourriture), ainsi qu’une quantité considérable de pollution chimique et hydrique, ajoutée à divers impacts sociaux négatifs.

Un T-shirt de base en coton, comme il s’en vend presque 2 milliards tous les ans dans le monde, a nécessité pour sa fabrication plus de 3 500 L d’eau, a parcouru près de 40 000 km, pour une empreinte carbone de 10 kg !

En aval de la chaîne de valeur (en l’occurrence ici une chaîne de pollution) :

5. On prend ensuite en compte l’entretien des articles (lavages, séchages et repassages), avec à nouveau l’utilisation de produits toxiques pour l’environnement… A chaque lavage, les fibres synthétiques rejettent des microparticules de plastique, qui, trop fines pour être filtrées par les centrales d’épuration, sont évacuées dans les cours d’eau. Résultat : chaque année, 500 000 tonnes de micro-plastiques finissent leur course dans les océans, soit l’équivalent de 50 milliards de bouteilles en plastique. Ces fibres vont alimenter le fameux « continent de plastique ».

6. En fin de vie de notre vêtement, le choix idéal irait vers le don si c’est possible ou le recyclage, malheureusement moins d’un tiers des textiles est effectivement recyclée, les autres passent tout bonnement dans la poubelle…

Axes de solutions

Un premier axe de solutions est de modifier notre consommation de vêtements. Il existe plusieurs solutions, certaines très simples, pour changer ses habitudes, qui prend la forme, comme pour tous les autres postes de consommation, du modèle 5R (Réduire, Réutiliser, Réparer, Recycler, Repenser) :

  • Repenser ou réduire sa consommation, par exemple en se demandant si on a réellement besoin/envie de cet achat, en évitant d’aller faire les soldes sans besoins particuliers (70% des vêtements achetés ne seraient jamais portés !), en connaissant mieux le contenu de nos armoires et nos besoins réels, en se désabonnant des newsletters journalières trop tentantes…
  • Réutiliser. Troquer, échanger, partager : la mode « seconde main » est une idée définitivement positive. Occasion, troc, partage, don, friperie, dépôt vente, magasins solidaires, vente d’occasion en ligne, recycleries, locations pour les occasions spéciales… De nombreuses solutions existent !
  • Réparer : après la seconde main, la seconde vie. Ici on parle de raccommodage, de transformation, de DIY…
  • Recycler : en dernier ressort, si on doit se séparer de ses textiles, le recyclage est à rechercher plutôt que de jeter. En France, tous les vêtements et chaussures peuvent être apportés dans un point de collecte. Si tu ne connais pas le plus proche de chez toi, va sur le site La fibre du tri !

Si la décision d’acheter un produit textile neuf a été mûrement réfléchie, il existe également des réflexes pour limiter l’empreinte écologique de ses achats.

  • Les matières comme le polyester, le polyamide, la viscose, l’acrylique, l’acétate et l’élasthanne sont à éviter autant que possible, au profit de vêtements en fibres naturelles végétales bio comme le coton bio, le lin, le chanvre, les fibres naturelles animales comme la laine, les fibres artificielles et synthétiques comme le Lyocell (produit à partir de bois) et les matières recyclées comme le coton recyclé, la laine recyclée…
  • Des labels de référence peuvent nous aiguiller dans nos choix, comme GOTS, Bioré et Oeko-Tex et World Fair Trade Organization pour des vêtements respectant l’environnement et les conditions de travail décentes.
  • La dernière option est de consommer local. Les produits ne sont pas toujours parfaits en termes de matières premières et de processus de production, mais le transport est quasi nul et l’acte est citoyen en faveur du tissu associatif et productif local.

Du côté des producteurs, une révolution est indispensable an ayant une règle en tête : rien ne se perd, tout se transforme. Il faut penser dès le début la durabilité, la réparabilité et la recyclabilité du produit. Et au maximum utiliser des matières recyclées pour faire de nouveaux produits, ce qui permettra de diminuer drastiquement l’utilisation de coton gourmand en eau et de matières synthétiques dépendantes du pétrole.

La traçabilité de ces nouvelles matières est également fondamentale. Si ces fibres participent à la déforestation et à des conditions de travail déplorables on ne fait qu’éteindre un feu pour en allumer un autre.

Les matières naturelles végétales qui nécessitent peu d’eau et pas de pesticides, comme le lin et le chanvre, sont à favoriser. Pour un rendu esthétique différent, le tencel peut être intéressant, mais le problème reste la traçabilité. Pour les non végans, la laine et le cuir peuvent être intéressants, mais doivent provenir d’élevages équitables, avec de l’agroforesterie. Enfin des matières à base de sous-produits de l’industrie agroalimentaire (épluchures d’agrumes ou de betteraves, marc de café) pourraient être intéressantes.
Il faut également développer les techniques pour optimiser les découpes et éviter les chutes. Le design des vêtements devra prendre en compte ces aspects.

Plusieurs marques se sont engagées dans cette voie, comme par exemple : Le Basiq, La Gentle Factory, Armed Angels, Do You Green, Patagonia, Picture Organic Clothing, El Naturalista, Veja, Ecoalf, Nudie Jeans, Tonlé, Wintervacht, Olly, Indosole, Novel Supply, Mud Jeans…

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