Déchets et économie circulaire

La production et l’acheminement des biens que nous consommons entraînent une extraction de ressources et relâchent des déchets et rejets dans l’environnement (émissions de gaz à effet de serre, plastiques...). Une solution réside dans le déploiement rapide et ambitieux de l'économie circulaire appliquée à tous les secteurs, avec le soutien fort des collectivités publiques françaises et européennes et l'implication des citoyens.

Impacts écologiques et sociaux

La plupart des biens que nous produisons aujourd’hui sont amenés à devenir des déchets à court ou moyen terme. En plus des coûts, des pollutions et du gaspillage de ressources qu’ils représentent, leur gestion est responsable d’importantes émissions de gaz à effet de serre. Aux émissions dues à leur collecte et traitement, il faut ajouter celles émises durant le processus de production des biens de consommation avant qu’ils ne deviennent des déchets. Du produit au déchet, chaque étape du cycle de vie d’un bien a un impact sur le climat :

  • Le cycle de vie du produit : De l’extraction des matières premières (pétrole, métaux, denrées agricoles,…) à la distribution des biens manufacturés, en passant par les phases de transformation et de transport, des gaz à effet de serre sont émis à chaque étape du cycle de vie des produits.
  • La collecte et le transport des déchets : chaque année en France, 345 millions de tonnes de déchets sont collectées, majoritairement par camion, pour être transportées vers des centres de traitements.
  • Le traitement des déchets : actuellement, près des deux-tiers de nos déchets sont brûlés ou enfouis en décharge. Chaque année, leur combustion dans les incinérateurs rejette l’équivalent en CO2 de 2,3 millions de voitures. La mise en décharge des déchets représente à elle seule 16 % des émissions de méthane en France, un gaz 25 fois plus réchauffant que le CO2.

Prenons l’exemple du plastique. Avec 4,8 Mt de plastique utilisé chaque année, la France est l’un des principaux consommateurs de cette matière en Europe. Ramené au nombre d’habitant, cela représente plus de 70kg/hab/an. À l’échelle mondiale, nous recyclons à l’heure actuelle 14% des emballages plastiques, même si, le plus souvent, il s’agit en réalité d’un décyclage qui donne un produit de qualité inférieure. 40% sont mis en décharge, 14% sont brûlés dans des incinérateurs et 32% finissent dans l’environnement.

La gestion des déchets peut par ailleurs donner lieu à des effets pervers :

  • Un «effet rebond» qui verrait la production de déchets stagner ou s’accroître par la croyance en une « compensation » par le recyclage (mécanisme dit de « compensation de la conscience ») ;
  • Un «effet aspirateur» des investissements lourds en équipements de traitement des déchets, dont la rentabilité nécessite la plupart du temps l’accès à un gisement de déchets constant, peuvent entrer en conflit avec les stratégies locales de prévention des déchets ;
  • Un «effet déchet-ressource financière» favorisant la captation par certaines entreprises privées des déchets qui présentent la plus forte plus-value (certains plastiques, métaux, etc.), voire faisant courir le risque de mécanismes de clientélisme pouvant même dériver vers des situations de type mafieux ; ce dernier effet peut conduire à inhiber les stratégies de prévention des déchets et, dans le pire des cas, à un retour à une gestion anarchique des déchets.

Axes de solutions

Les déchets et leur traitement sont l’aboutissement d’un mode de production énergivore et émetteur de gaz à effet de serre. La première des solutions pour diminuer ces émissions et lutter contre les changements climatiques est donc de réduire à la source la quantité de déchets (chaque Français en produit actuellement 590 kg/an), et, dans un second temps, de valoriser la part restante, par le recyclage et le compostage. Car pour le climat aussi, le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas !

  • Produire et consommer sobrement : privilégier les produits non jetables, conçus pour durer et in fine être recyclés, limiter les achats et emballages superflus, le gaspillage alimentaire,… sont autant de gestes qui permettent de préserver des matières premières et de l’énergie !
  • Optimiser l’usage : Allonger la durée de vie et l’usage d’un objet pour éviter d’en fabriquer de nouveaux : en mutualisant certains objets, en achetant de seconde main, en optant pour la réparation, etc.
  • Préserver la matière : Traiter séparément les biodéchets pour en faire du compost permet d’alléger sa poubelle d’au moins 40 kg par an, en plus de créer un engrais naturel et écologique. Trier les déchets recyclables permet de récupérer une partie des matières afin de les réintégrer dans un circuit de production, économisant de l’énergie et des matières premières.

L’ensemble des solutions peut être regroupé au sein du concept d’économie circulaire.
Selon l’ADEME, l’économie circulaire peut se définir comme un système économique d’échange et de production qui, à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l’efficacité de l’utilisation des ressources et à diminuer l’impact sur l’environnement tout en développant le bien être des individus.
L’économie circulaire doit viser globalement à diminuer drastiquement le gaspillage des ressources afin de découpler la consommation des ressources de la croissance du PIB tout en assurant la réduction des impacts environnementaux et l’augmentation du bien-être. Il s’agit de faire plus et mieux avec moins .

Plusieurs leviers sont actionnables pour limiter le recours aux ressources épuisables à différents niveaux du cycle de consommation :

  • Avant : réduire la quantité de matières premières pour fabriquer des produits ;
  • Pendant : mettre au point des produits plus durables et réparables ;
  • Après : recycler les déchets pour les réutiliser dans d’autres productions.

Bien que certains assimilent encore l’économie circulaire au seul recyclage, la plupart des travaux et acteurs convergent vers une notion de l’économie circulaire s’articulant autour d’une prise en compte large de trois champs sur l’ensemble des ressources :

  • Production et offre de biens et services : approvisionnement durable en ressources – qu’elles soient renouvelables ou non renouvelables -, écoconception des biens et services, développement de l’écologie industrielle et territoriale et mise en œuvre de l’économie de la fonctionnalité (recours à un service plutôt que la possession d’un bien)
  • Consommation – demande et comportement : achat responsable, bonne utilisation des produits, recours au réemploi et à la réparation
  • Gestion des déchets : bien que la production et la consommation responsable soient de nature à limiter la production des déchets dans le cadre de la politique de prévention, la gestion des déchets restants doit favoriser le recyclage et, si besoin, la valorisation énergétique. L’énergie fatale non consommée est aussi à considérer.

Les acteurs économiques produisent 90% des déchets, dont près de 70% rien que pour le secteur de la construction.

L’économie circulaire vise à bâtir un nouveau modèle économique qui conduit très rapidement, par rapprochement avec les approches de décroissance, à s’interroger sur un impact souvent perçu a priori négatif en termes d’emploi. Or l’économie circulaire permet de développer de nouvelles activités et de consolider des filières industrielles. Elle permet ainsi de créer des emplois locaux, pérennes et non délocalisables.

A titre d’exemple, le développement d’activités de réparation des produits usagés, de réutilisation ou de recyclage des déchets, génère de l’ordre de 25 fois plus d’emplois que la mise en décharge de ces déchets.
Dans ce cadre, une étude de France Stratégie estime que l’économie circulaire concerne 800 000 emplois en France. S’agissant plus spécifiquement des activités liées à la gestion des déchets (qui concernent actuellement 135 000 emplois en France), on estime le gain potentiel via les mesures instituées par la loi de transition énergétique pour la croissance verte d’emplois à 25 000 à l’horizon 2025.

L’économie circulaire repose avant tout sur les entreprises : les méthodes qu’elles utilisent pour extraire des ressources jouent directement sur la production de déchets ; la manière de fabriquer des produits influence leur durée de vie ; la capacité à les réparer et les conséquences futures sur l’environnement.
Voici quelques exemples d’initiatives concrètes : Fairphone conçoit et commercialise un smartphone modulaire et éthique, conçu pour être facilement réparé. L’Increvable est une entreprise française qui conçoit un lave-linge facilement réparable et à grande durée de vie. Jean Bouteille développe la vente de liquides en vrac. Clothparency aide les consommateurs à prendre conscience de l’empreinte écologique des vêtements qu’ils achètent. Zero Waste France est une ONG qui promeut la réduction des déchets à la source et l’économie circulaire. Mutum propose des services de partages de biens.

L’État peut jouer un rôle déterminant pour favoriser cette forme d’économie, en interdisant certains comportements et en en encourageant d’autres par des incitations financières, ou en reconnaissant l’obsolescence programmée comme délit en 2015.

Quelques décisions politiques importantes ont été prises en France lors des 30 dernières années.

  • 1992 : les producteurs sont tenus responsables de l’élimination des déchets d’emballages qui résultent de la consommation de leurs produits par les ménages.
  • 1992 : les communes sont obligées de valoriser et recycler les déchets.
  • 2002 : il est interdit de mettre en décharge des déchets « non-ultimes », c’est-à-dire qui peuvent faire l’objet d’une valorisation (recyclage, incinération avec production d’énergie, etc.).
  • 2005 : les fabricants doivent proposer l’enlèvement gratuit de leurs appareils électriques et électroniques usagés.
  • 2015 : les fabricants doivent informer leurs clients sur la « réparabilité », c’est-à-dire la disponibilité de pièces détachées pour réparer les appareils défectueux, et fournir les pièces sous deux mois.
  • 2015 : les pratiques d’obsolescence programmée deviennent un délit, qui peut être poursuivi en justice.
  • 2016 : les professionnels qui produisent des déchets (papier, carton, métal, plastique, verre et bois) doivent les trier à la source.
  • 2016 : les supermarchés doivent distribuer leurs invendus alimentaires à des associations pour éviter le gaspillage.
  • 2017 : les sacs plastiques à usage unique sont interdits à la caisse des commerces.

Par ailleurs, la commande publique, de même que le dispositif « Administration exemplaire », doivent être des leviers pour développer l’économie circulaire. Entre autres mesures, l’Etat, ses opérateurs ainsi que les collectivités devront consommer au moins 50% de papier recyclé à compter du 1er janvier 2022. De même, d’ici à la fin 2018, ils devront utiliser des téléphones issus du réemploi, et des pneumatiques rechapés pour les flottes des administrations d’ici à 2019.

La Commission européenne a publié le 11 mars 2020 un nouveau plan d’action pour une économie circulaire dans le cadre du pacte vert européen. Le plan, par nature peu détaillé à ce stade, comprend à la fois des annonces de mesures législatives, plus d’une dizaine, et non législatives en mettant la priorité sur de nouveaux modes de production et de consommation fondés sur la réparabilité, le recyclage et le renforcement des droits des consommateurs. Le plan se concentre sur des secteurs fortement consommateurs de ressources et où le potentiel de circularité est élevé : emballages, produits électroniques, plastiques, textiles, construction. Enfin, il annonce un renforcement des mesures relatives à la gestion des déchets passant par la révision de directives du paquet déchets (véhicules hors d’usage, piles et batteries…).

La Commission annonce une initiative législative globale en faveur d’une politique produit durable qui se décline en trois points. Tout d’abord, le renforcement de l’éco-conception. Mais elle compte s’appuyer également sur les consommateurs afin de favoriser la dynamique de l’économie circulaire. Enfin, la Commission entend renforcer le rôle de levier des marchés publics verts en établissant des critères minima obligatoires pour les marchés publics verts et l’obligation de rapportage sur la commande publique verte.

Enfin, par leurs comportements, les consommateurs ont une responsabilité importante. Cela peut passer par le choix de produits plus durables ou par un recyclage plus systématique. L’économie circulaire peut également se conjuguer avec une réduction de la consommation, favorisée par exemple de l’économie collaborative, qui consiste à utiliser un service sans forcément être propriétaire du produit (le covoiturage, l’échange de services entre particuliers, etc.).

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