Morizot (Baptiste)

1983- ?, Français

Baptiste Morizot est philosophe, maître de conférence à l'Université d'Aix-Marseille. Ses recherches en philosophie se tournent vers la place des humains au sein du monde vivant (et non en dehors de la nature).

Il se fait notamment connaître pour son ouvrage « Les diplomates. Cohabiter avec les loups sur une autre carte du vivant ». Il y défend la possibilité d’établir des relations entre les humains et les autres vivants, qui échappent aux modèles traditionnels (gestion, régulation quantitative, sanctuarisation), sous la forme de ce qu’il appelle une diplomatie. La diplomatie avec le vivant constitue à la fois une forme d’attention et un mode de résolution des conflits entre humains et vivants, fondé sur la possibilité de communiquer, allant ainsi contre l’idée que le seul rapport possible avec le monde vivant est le rapport de force.

Il défend la pertinence d’une nouvelle grammaire environnementale pour qualifier nos relations avec les autres vivants dans l’article « Nouvelles alliances avec la terre. Une cohabitation diplomatique avec le vivant ». La formulation de cette approche est précisée dans un dialogue qui réunit Bruno Latour, Pierre Charbonnier et Baptiste Morizot, intitulé « Redécouvrir la terre ».

Son dernier ouvrage en date, « Manières d’être vivant » sort aux éditions Actes Sud, en Février 2020. Il y soutient que nous devons renverser notre manière de vivre au monde, puisque c’est aux vivants que nous devons la possibilité d’exister. Il y déclare que nous Humains, considérons les dix millions d’autres espèces de la Terre, nos parentes, comme la « nature ». Ce qui revient à les voir non pas comme des êtres mais comme des choses, non pas des acteurs mais le décor, des ressources à portée de main. Une espèce d’un côté, dix millions de l’autre, et pourtant une seule famille, un seul monde. Cette fiction est notre héritage. Sa violence a contribué aux bouleversements écologiques. C’est pourquoi selon lui nous avons une bataille culturelle à mener quant à l’importance à restituer au vivant.

Prenant acte de la crise écologique systémique, l’auteur cherche à remédier à une « crise de la sensibilité », c’est-à-dire à un appauvrissement de ce que l’homme peut voir, sentir et comprendre de son environnement, notamment dans les relations qu’il entretient à l’égard des autres espèces animales. La capacité de l’homme moderne à entendre et à comprendre les signes qu’émettent les autres espèces s’est considérablement amoindrie sous l’effet d’une pensée dualiste qui sépare l’homme de la nature.

Afin de restaurer notre sensibilité au vivant, Baptiste Morizot propose de revoir la manière dont nous considérons nos relations avec les autres espèces. L’homme doit apprendre à se détacher de la pensée narcissique de sa propre supériorité spirituelle et technique, qui le conduit à être complètement aveugle et sourd à l’égard du vivant. 

D’autre part, les animaux ne devraient pas être considérés comme inférieurs ou supérieurs : « ils incarnent avant tout d’autres manières d’être vivant ». Comme projet philosophique, la restauration de la sensibilité humaine au vivant pousse l’auteur à explorer des concepts comme celui de « diplomate », « d’interdépendance » entre espèces, de « communauté d’importance » ou encore de « diplomatie des interdépendances ». 

Le diplomate se tient entre les espèces et entre les positions. Il chercher à « résoudre sans violence les problèmes de cohabitation entre communautés ». Il peut intercéder pour rappeler le moment où l’on oublie le fait que l’homme est inséparable des autres espèces, qu’elles soient domestiques (les brebis) ou sauvages (les loups). Ce travail d’intermédiaire a pour effet de brouiller les positions arrêtées, de telle sorte qu’il est impossible de défendre un camp contre un autre. Le diplomate se met en définitive au service de la relation elle-même, au service de la manière dont les usages humains d’un territoire peuvent être combinés, tissés avec des usages non-humains :

Il s’agit d’apprendre à habiter autrement : « habiter, c’est toujours cohabiter, parmi d’autres formes de vie ». L’auteur souligne combien la dimension politique de ce projet est ambiguë et complexe lorsqu’il s’agit du loup :

« On voit ici à quel point l’alternative habituelle, à savoir stigmatiser le pastoralisme en bloc comme s’il était l’ennemi malhonnête de la biodiversité, ou l’adouber en bloc comme s’il était le maillon essentiel de la préservation des paysages, ne tient pas : tout dépend des pratiques, et il faut penser une transformation de l’usage pastoral des territoires, qui aille dans le sens d’une protection accrue des prairies, des loups et du métier lui-même ; ce sont ces axes de communauté d’importance qui sont à faire émerger »

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